jeudi 1 décembre 2011

Metamanoir, DALE COOPER QUARTET & THE DICTAPHONES, Denovali, Novembre 2011 (Par Riton)



       Denovali? Encore Denovali? Oui les amis... et ne comptez pas sur moi pour m'excuser! Denovali est en passe de devenir l'un de mes labels phares et au regard de ses sorties de 2011 mérite bien une petite récompense : Birds Of Passage en veux-tu en voilà, Thisquietarmy à toutes les sauces, Aun, Blueneck, Contemporary Noise Sextet et j'en passe...

       Et ce n'est pas parce que nous sommes en fin d'année, déjà prêts à dégainer de la fourchette sur de pauvres dindes "emmarronnées", que le label allemand se repose... il montre au contraire sa façon de se comporter à table et de remettre le couvert. Pas moins de deux longs formats ce mois-ci (donc sans compter les rééditions et EP) mais mon choix s'est porté sur Metamanoir, deuxième album du brestois Dale Cooper et de ses Dictaphones.

       Tout autant attiré par le style que par la référence à Twin Peaks, Parole de Navarre, sorti en 2006, m'avait déjà fait grande impression (en vérité je n'ai découvert ce premier opus qu'en 2010, après réédition). Je ne saurais dire si l'étrange concordance des actualités y est pour quelque chose, mais avec Metamanoir cette impression est intacte, voire accrue... jugez par vous-même : au même moment David Lynch se décidait enfin à offrir un album solo digne de sa filmographie, repoussant par la même les doutes portés par ses errances électroniques de début d'année... De nouvelles (et excellentes) apparitions sonores d'Angelo Badalamenti se faisaient également entendre au travers des cascades vrombissantes de Drive (mesdames, laissez-moi vous convaincre que ce "détail" est bien plus sexy que ce bellatre de fou du volant de Ryan Gosling...)... Troublantes coïncidences ou symptomes d'une rechute de lynchiite aigue? Quoiqu'il en soit suffisamment pour donner l'envie (il m'en faut peu, j'avoue...) de retrouver Dale Cooper à l'écran et de compléter par l'écoute du Metamanoir de son homonyme breton.

       Ambiance feutrée pour un jazz ambient sombre et cinématique, dont Denovali se pose désormais en spécialiste (après la sortie des manifestes de The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble et The Mount Fuji Doomjazz Corporation) : quartet cuivré aux accents mélancoliques bien moins rugueux que par le passé, la musique du groupe se veut plus accessible, plus lumineuse, touchée par la grâce des voix de Gaëlle Kerrien (également collaboratrice de Yann Tiersen, un autre breton) et Zalie Bellacicco. Quand les deux belles ne chantent pas, Yannick Martin s'exprime à la manière d'un Mark Hollis, chaleureux... ou laisse tout simplement parler la musique, aère. Bienvenue dans un songe étrange... une brume épaisse et bleutée s'élevant du sol... la pluie battant les carreaux... Tout semble calme en apparence, mais particulièrement mystérieux. D'une beauté bouleversante et immersive, il n'est pas difficile de se perdre dans cet album labyrinthique où les morceaux constituent autant de chemins, trompeurs jusque dans leurs titres aux allures de poèmes dada, en un français approximatif ("Une Petit Cellier", "Ma Insaisissable Abri", "Sa Prodigieux Hermitage"...). Mais derrière eux se cachent de nombreux détails, le fourmillement d'une production parfaite, travaillée.

Metamanoir est de ces albums qui se ressentent plutôt qu'ils ne s'écoutent, de ces disques sensoriels bénéfiques qui prennent leur temps, se vivent... à placer dans les petits plaisirs quotidiens si chers à l'agent Dale Cooper, au milieu d'un bon café et d'une part de tarte.

Riton

Erratum : Une petite erreur s'est malencontreusement glissée dans cette chronique. En effet la BO de Drive, prêtée à Angelo Badalamenti, a en fait été composée par Cliff Martinez (collaborateur régulier de Steven Soderbergh, entre autres...). Une explication des plus claires est donnée ici.... Était-ce vraiment une erreur de ma part ou voulais-je tout simplement y trouver du Lynch? Quoiqu'il en soit la musique de Cliff Martinez y est tout bonnement excellente!

Metamanoir en trois mots : sombre, élégant, sensoriel


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • Parole De NavarreDALE COOPER QUARTET & THE DICTAPHONES, Diesel Combustible, 2009 : Ce premier essai des bretons constitue la bande son idéal du film noir et les ébauches d'un hommage très juste à l'univers de David Lynch. Vivement conseillé!

  • From The StairwellTHE KILIMANJARO DARKJAZZ ENSEMBLE, Denovali, 2011 : Comme son nom ne l'indique pas, The Kilimanjaro Darkjazz Ensemble est hollandais, énième projet de Jason Kohnen (plus connu sous le nom de Bong-Ra)... entre jazz, électro, drone avec pour point de repère le cinéma... un disque renversant d'ingéniosité, de mélodies, survolté et tout simplement prenant!

  • BeileidBOHREN & DER CLUB OF GORE, Ipecac, 2011 : Direction l'allemagne pour un groupe tout aussi proche des musiques de films... cet album (mini-album?) de trois morceaux, en plus d'être très beau, dispose d'un featuring de choc en la personne de Mike Patton... particulièrement bon!

  • Manafon, DAVID SYLVIAN, Samadhisound, 2009 : quel chemin parcouru depuis le split de Japan! Avec Manafon David Sylvian présente son album le plus jusqu'au boutiste... entre folk d'avant-garde et jazz parlé ce disque est à mon goût (et ce malgré sa difficulté d'appréhension) un de ses plus beaux chefs d'oeuvres.

If Then Not When, KING'S DAUGHTERS & SONS, Chemikal Underground, novembre 2011 (Par Gagoun)



       Ça, c'est ce que l'on appelle un vrai coup de cœur. Alors que je m’apprêtais à vous faire partager mon amour immodéré pour Atlas Sound et son dernier album, voilà que Riton me fait part de sa curiosité à propos d'un tout nouveau groupe venant de sortir son premier album (cela va de soit...) : King's Daughters & Sons. Tout un programme. Si je vous écris ceci, c'est parce que, et vous vous en doutez bien, ce groupe sera l'objet de ma chronique et donc par extension, que leur album m'a énormément plu.

       King's Daughters & Sons, c'est d'abord une espèce de supergroupe avec des gens quasiment inconnus mais pas dénués de talent pour autant, ni d'envie. On y retrouve entre autres le batteur de Shipping News, Kyle Crabtree, ou encore Rachel Grimes, œuvrant tout aussi bien en solo qu'avec les Grim's ou Shannon Wright. Et enfin au mastering, monsieur Bob Weston en personne s'il vous plaît, le tiers de Shellac, aussi furieux et intransigeant que son acolyte Steve Albini quand il s'agit de s'attaquer au son.

       Au total, deux guitares, trois voix, une batterie, une basse et un clavier, rien de très original à priori mais un résultat surprenant et détonnant que ce If Then not when. La somme des influences de ces musiciens dans leurs projets respectifs rend cet album unique. Post-rock, Folk rock, Slowcore (aaaah les étiquettes!), on retrouve plein de choses dans cette œuvre, des passages instrumentaux en montagnes russes héritées du Post-rock ("A Storm Kept Them Away") à de magnifiques ballades rappelant tout aussi bien la classe des plus grands (Bob Dylan sur "Dead Letter Office" , Leonard Cohen, Bill Callahan ou encore Aidan Moffat d'Arab Strap, le groupe étant d'ailleurs signé sur leur label Chemikal Underground, tiens, tiens...) en passant par une fragilité émotionnelle tout droit venue de Low ("Open Sky"). On notera également les moments magiques que constituent l’entraînante "The Anniversary" et son final tout en puissance ainsi que l'acoustique "Lorelei", magnifique dans sa retenue, sa sobriété et ses petits détails que l'on découvre à chaque nouvelle écoute.

       Il est de ces albums sortis de nulle part, au bon moment et qui vous apparaissent de suite évidents. Comme de coutume avec Bob Weston, le son est lourd, rend ces guitares entrelacées, rêches avec toutes leurs aspérités, leurs dissonances et leur moments de grâce. La distorsion y est presque naturelle à force de gratter les cordes avec rage. La basse, qui apporte une tension permanente à l'ensemble, vrombit (faut dire que le monsieur s'y connait en matière de basse méchante en mode « je sors tout droit des entrailles de la terre et je vous emmerde ! »). De la même manière la batterie est lourde mais puissante tandis que le piano se veut souvent à fleur de peau, parfois planant, toujours touchant. Sur le fil, entre puissance, classe et fragilité, If Then not when est un album absolument magique, qui s'impose à nous comme l'hiver au mois de novembre. Ces "spectral murder ballads, from Kentucky", comme aime à les qualifier le magazine Uncut, sont juste somptueuses et viennent hanter nos esprits en cette période un peu froide, voire glaciale. Merci à elles.

Gagoun

If Then Not When en trois mots : classe, habité, unique


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être :

  • The Great Destroyer, LOW, Sub Pop, 2005 : Low, dont le dernier album a été chroniqué ici même au mois d'avril 2011, est un monument de l'indie rock. La lourdeur, le minimalisme tout en fragilité dont il font preuve depuis le début de leur longue carrière est ici quelque peu nuancée par des ambiances plus chaudes et variées, des guitares acoustiques et un duo Alan Sparhawk/Mimi Parker toujours au top. A l'instar du trio Rachel Grimes/Joe Manning/Michael Heineman de King's Daughters & Sons?

  • 5 : 14 Fluoxytine Seagull Alcohol John Nicotine, MALCOLM MIDDLETON, 2002 : Le premier album de l'autre moitié d'Arab Strab est une petite merveille de folk/rock. Il confirme son talent de compositeur et prouve qu'il est aussi un excellent songwriter à travers cette œuvre intimiste, parfois surprenante mais dans tous les cas, singulière.

  • Offshore, EARLY DAY MINERS, Secretly Canadian, 2006 : depuis onze ans maintenant, les américains d'Early Day Miners font leur petit bonhomme de chemin en toute discrétion, en distillant une musique slowcore/post-rock sur laquelle la voix de Dan Burton vient se poser. Sur cet album, il partage le chant avec une demoiselle, Amber Webber et propose avec ses acolytes, six mouvements dérivés du morceau « Offshore », extrait de leur album de 2002, alternant ambiances éthérées, moments de bravoure et folk fragile. Un très bon cru!

mardi 1 novembre 2011

Western Teleport, EMPEROR X, Bar/None Records, Octobre 2011 (Par Gagoun)



       Emperor X n'est pas le dernier site porno à la mode. Emperor X est le projet musical du dénommé Chad Matheny, multi-instrumentaliste de son état. Encore un américain talentueux qui fait tout, tout seul ou presque chez lui, en Home Studio... Que c'est agaçant !! Le jeune musicien, adepte de folk, de lo-fi, de pop, a d'ailleurs une particularité, celle de multiplier les enregistrements K7, de les planquer un peu partout où il va et de faire jouer ses fans à « la carte aux trésors » en leur faisant miroiter les coordonnées GPS. Une version moderne des premiers enregistrements K7 de Daniel Johnston en quelque sorte, qui, lui, rejouait et réenregistrait son album à chaque commande d'un particulier avant de lui remettre en mains propres. C'est plus romantique mais moins rigolo.

       Pour ma part j'ai découvert Chad par l'intermédiaire de la page facebook d'un autre bidouilleur de génie : Ryland Bouchard, ex The Robot ate me, ne tarissant pas d'éloges sur le dernier album de son pote. Les nouvelles technologies, encore une fois...

       Dans ce Western Teleport, point de révolution musicale mais que du très bon, du très inspiré. Pendant une petite demi-heure, les perles pop s’enchainent de manière efficace et entraînantes. Surement l'album le plus cohérent du 'Sieur à ce jour. On est entraîné d'entrée par l'ouverture ''Erica Western Teleport'' et son refrain entêtant. Le reste de l'album est sur la même lancée, entre arrangements boisés, rythmiques parfois bancales, electro bidules savamment dosés, pianos qui grincent, voix un peu nasillarde et chœurs poignants. Les quelques envolées électrisantes sont assez jouissives je dois dire et viennent ajouter du punch à un album qui n'en manquait déjà pas. A cet égard on notera les magnifiques ''Allahu Akbar'' et ''Sincerely, H.C. Pregerson''. Le son, quant à lui, est racé, ample, avec sa petite touche Lo-fi qui fait toute cette chaleur humaine et qui vous donne envie de mettre à la poubelle tous les albums, avec guitares et batteries compressées, du monde.

Légèrement mélancolique mais pas trop, cet album est un petit bijou sur lequel, mine de rien, on revient souvent avec facilité, le genre d’œuvre dont on retient aisément les mélodies et qui passe tout seul et à tout moment de la journée. Rien de neuf donc, mais on s'en fout, pourvu que ce soit bon!

Gagoun

Western Teleport en trois mots : léger, pop, lo-fi

Pour jouer à « la carte au trésor » et découvrir l'album, c'est par ici :

Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • Tectonic Membrane/Thin Strip on an Edgeless Platform, EMPEROR X, Snowglobe, 2004 : Un des nombreux albums du monsieur. Plus long, plus hétérogène aussi, cette album contient vraiment de très bonnes chansons dans le plus pur style lo-fi d'Emperor X.

  • Retired Box, DANIEL JOHNSTON, Stress Record, 1984 : Parce que l'on ne peut pas parler décemment de lo-fi sans évoquer Daniel Johnston, voici sa septième cassette. Artiste extrêmement prolifique, Daniel Johnston fait partie de ses petits génies un peu étranges mais ô combien influents. Ses albums contiennent parfois du déchet, sont souvent difficiles à écouter mais sont toujours touchants et contiennent de vraies perles à l'image de la fermeture de celui-ci : la superbe "True Love Will Find You in the End".

  • They Ate Themselves, THE ROBOT ATE ME, Swim Slowly, 2002 : Un modèle du genre que notre ami Chad a dû écouter une paire de fois. A la fois, boisé, rock, electro et électrique, cet album représente parfaitement la douce folie des cinq de San Diego, perpétuée désormais en solo par son leader, Ryland Bouchard.

  • We Shall all be healed, THE MOUNTAIN GOATS, 4AD, 2004 : Même approche lo-fi, même dynamisme dans son rock acoustique, The Mountain Goats possède quelques similitudes avec Emperor X et le timbre de voix de son leader John Darnielle n'est pas sans rappeler celui de Chad Metheny. A écouter avec insistance!

Dear And Unfamiliar, BIRDS OF PASSAGE & LEONARDO ROSADO, Denovali, Octobre 2011 (Par Riton)



       Dear And Unfamiliar, c'est une rencontre des antipodes... géographiques, mais pas musicales... fruit de la collaboration entre Alicia Merz, néo-zélandaise officiant sous le nom de Birds Of Passage, et Leonardo Rosado, artiste portugais protéiforme, musicien, poète, photographe... Chacun explore à sa manière deux facettes de la musique drone, empruntent des voies différentes mais sensiblement complémentaires et profitent le temps d'un album de l'opportunité de nous embarquer littéralement sur le fleuve d'une musique bicéphale : d'un côté la poésie de l'océanienne si merveilleusement interprêtée, et de l'autre les motifs borderline du lusitanien, le tout à travers un habituel flot de reverbe et d'écho... un voyage contemplatif au pays de la zenitude, sauf qu'ici exit les mélodies folkisantes du Without The World de la belle et place à une approche plus ambient et épurée.

       Un album orangé (l'artwork est tout droit sorti du pinceau de Leonardo Rosado) aux allures de procession spirituelle. Les deux musiciens (apparaissant en noir sur la pochette... du moins en toute logique) nous prennent par la main et nous emmènent quelque part entre l'Inde et les cieux. Mais attention le couple ne tombe pas dans le piège du trip new age sans saveur et fait les choses en grand. Les compositions de Leonardo Rosado s'avèrent être d'une rare finesse et d'une complexité déconcertante de beauté : ses synthés et ses quelques guitares se mélangent à des sonorités plus inconnues... concrètes... glitch... ou l'on ne sait trop quoi... parfois pulsées de manière extrèmement déconstruites ("You Wore Blue", "Of Your Charm" et ses percussions presques animales, "To Wander Slow With Me"...) parfois étirées sans autre point de repère que la voix si douce et rassurante d'Alicia (le magnifique "We'll Always Have Paris", le non-moins extraordinaire "Your Lullabies"...). S'en est à se demander si autre collaboratrice (ou collaborateur) aurait pu faire l'affaire tant cette voix parait ancrée, indissociable.

       A noter également l'excellent travail de production de Nils Frahm (lui-même a sorti un album solo des plus intéressants ce mois-ci... entièrement au piano), qui derrière l'apparente massivité des résonances de cette musique a réussi un tour de force en arrivant à laisser chaque détail s'exprimer... suffisamment pour qu'à chacune de mes écoutes ceux-ci m'apparaissent comme totalement nouveaux.

       Dear And Unfamiliar est un excellent album de soirée pré-sommeil et un encore plus magnifique album nocturne. Au milieu des excellents Grouper, Noveller ou encore Motion Sickness of Time Travel, la musique d'Alicia Merz n'est décidément pas de trop (on aurait au contraire pu craindre l'overdose de (dr)one-woman bands) et prouve avec cette collaboration qu'elle n'est pas qu'un oiseau de passage. La bonne nouvelle est qu'un prochain album, cette fois de nouveau en solo, est déjà prévu pour la fin d'année.

Riton

Dear And Unfamiliar en trois mots : zen, nocturne, complexe


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • Without The World, BIRDS OF PASSAGE, Denovali, 2011 : Premier album d'Alicia Merz sorti en 2010 et réédité cette année sur le label allemand. Probablement le plus folk des projets de ce genre... un premier album magnifique, des morceaux prenants pour les nuits d'hiver (mention spéciale à "Fantastic Frown", qui tourne en boucle chez moi depuis la découverte)

  • Opaque Glitter, LEONARDO ROSADO, FeedBackLoop, 2011 : Un tour de démonstration de drone ambient poignant, intelligent, essentiellement instrumental. Que dire de plus à part que cet album pourrait être une bonne porte d'entrée au style en général...

  • Tragedy, JULIA HOLTER, Leaving Records, 2011 : Cet album de Julia Holter est comme qui dirait légèrement passé à la trappe lors de sa sortie en septembre (du moins presque, Pitchfork m'a devancé en le chroniquant il y a quelques semaines). Pourtant la qualité est bien présente : une musique d'un autre temps, inquiétante et rassurante à la fois, comme une réponse féminine, plus sensible, finalement plus "pop" (je pourrais encore y trouver du Cocteau Twins mais je ne le ferai pas à chaque fois), à la démarche si hermétique, et ô combien intéressante d'un Leyland Kirby par exemple.

  • Sleeping through The Veil Of The Unconscious, MOTION SICKNESS OF TIME TRAVEL, Digitalis Recordings, 2010 : J'ai découvert ce projet relativement tard mais en suis d'entrée tombé amoureux : les mélodies électroniques de Rachel Evans, une fois apprivoisées ont quelque chose de féerique! Seul hic... la musicienne est difficile à suivre tant elle est productive... et sa légère préférence pour des supports cassettes à tirages limités n'est forcement pas très arrangeante...

samedi 1 octobre 2011

Unison, UNISON, Lentonia Records, Septembre 2011 (Par Riton)



       Logo acéré (signé Christophe Szpajdel, l'homme derrière les logos d'Emperor, Enthroned ou encore Tsjuder pour les plus connus...), grisaille et figures fantomatiques (deux petites filles au regard perdu, au bord d'une route)... Unison n'est pas un groupe de black metal comme les autres! Probablement parce qu'Unison n'est pas du tout un groupe de black metal. Et si le cadre noircit le tableau, l'oeuvre n'en est pas moins sombre : point de démons et d'outre-tombisme mais la pesanteur d'une atmosphère glaciale et obscure transpire à travers le premier album de ce couple de musiciens niortais. Mélanie Moran, chanteuse, et Julien Camanera aux machines et à la guitare, essuient les plâtres de ce qui à tord a mondialement été appelé Witch House (certains les considèrent même comme représentants du mouvement en France). Sans cesse injustement comparés aux très discutables Salem, le groupe préfère se définir comme "deathgaze"... comprendre par là la confluence de murs de son shoegaze et de rivières funestes. Impossible désormais de m'en cacher... un septembre pluvieux coule de mes enceintes.

       Dans un bain de nappes synthétiques, de boucles rythmiques azimutes d'une efficacité presque militaire, Unison est tour à tour planant, atmosphérique (l'instrumental "Arp Quad Rollerskate", le très Cocteau-twinien "First Degree"), mélancolique ("Harmless", "Darkness") et petit à petit les filiations certes existantes mais raccourcies prêtées au groupe s'effacent derrière une sensibilité réellement rock ("Lost Generation" et sa grosse caisse massive, "Brothers and sisters", sa ligne de basse médium, comme jouée au médiator, et une guitare discrète mais surprenante, bénie, tombée du ciel...). A la lourdeur du beat s'impose la mélodie, sublimée par la voix si délicate de Mélanie, à la fois sensuelle, sensible, parfois presque enfantine, étonnamment fragile. Si parfois lorsqu'il s'agit de chroniquer un disque certaines comparaisons semblent hasardeuses, les relans de Liz Fraser apparus à mon esprit paraissent justifiés (La chanteuse est certes inimitable mais pas ininfluante). Ou bien serait-ce tout simplement ma nostalgie coldwave qui refait une fois n'est pas coutume surface?.... le fond de catalogue de 4AD auquel je fais si souvent référence... (quand bien même ceux-ci dépoussièrent au compte-goutte à prix exorbitant).

       Quoiqu'il en soit Unison possédait en de nombreux points les qualités d'une future amourette... et ça n'a pas loupé! Absorbé mais insatiable... voracité de mélomane confrontée à la générosité d'un album viscéral, dépareillant par la même avec l'inévitable image shoegaze de musiciens, yeux baissés, fixés à leurs pédales. Au contraire ici tout est débordant d'altruisme : submergé d'émotions, la musique parait rapidement faite d'une seule couche d'éléments homogènes, à l'unis(s)on. Longtemps fâché avec l’électronique, Unison me rappelle avec force que synthétique ne veut pas dire inhumain.

       Longue vie à ce couple de talent!... suffisamment insolent pour avoir sorti dès le départ un coup de maître... suffisamment attachant pour donner envie d'entendre la suite...

Riton

Unison en trois mots : sombre, mélancolique, fragile


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être :

  • Garlands, COCTEAU TWINS, 4AD, 1982 : Premier album de Cocteau Twins, Garlands n'est pas à proprement parlé l'album le plus populaire... (on préfère généralement parler de Treasure ou de Victorialand). Dans ce premier opus, on trouve déjà ce qui fera la signature du groupe... ce brin de nostalgie mélancolique, la voix si particulière de Liz Fraser... le tout est ici mêlé à des sonorités synthétiques, que le groupe délaissera pas la suite.

  • Future Songs, CRANES, Dadaphonic, 2001 : Impossible de parler de voix féminine presque enfantine sans évoquer un seul album des Cranes. La première fois que j'ai entendu Alison Shaw, j'ai eu envie de la consoler, la protéger, tant elle semblait fragile, menacée... au milieu de ce rock sombre et oppressant pratiqué par le groupe. Addictif... et attachant!

  • Stridulum II, ZOLA JESUS, Souterrains Transmissions, 2010 : Pour continuer avec les confidences, j'attendais le nouvel album de Zola Jesus (Conatus, sorti ce mois-ci) comme le messie... malheureusement la déception m'oblige à me reposer sur l'album précédent. Stridulum II... un electro-rock à l'enveloppe gothique, orchestré par une Nika Roza Danilova (non, ce n'est pas une joueuse de tennis) grandiloquente, impressionnante par sa présence et son charisme... déjà un classique!

  • Erostrate, CERCUEIL, Le son du maquis, 2011 : Il est toujours plaisant de faire la promotion d'un groupe de sa région... surtout quand celui-ci est passé rapidement de simple groupe local à international, et de façon plus que mérité... en offrant un rock electro sombre et lumineux à la fois, avec encore une fois la présence sensuelle d'une chanteuse des plus remarquables (Penelope)... c'était chronique à thème en fait?


The Year of Hibernation, YOUTH LAGOON, Fat Possum, Septembre 2011 (Par Gagoun)



       Quand on sait que le Sieur qui se cache derrière Youth Lagoon, à savoir un p'tit jeune répondant au doux nom de Trevor William Powers, vient de l'Idaho, la région où il fait bon être mélancolique, où spleen rime avec montagnes enneigées, lacs gelés et grands espaces, on ne peut s'étonner d'une telle musique. Une pop légère et fragile que Jeff Martin n'aurait pas reniée. Des perles en cascade comme autant d'hymnes à la mélancolie, à la beauté et à la mélodie simples, de celles qui vont droit au cœur, sans détours, sans fioritures et qui vous restent dans la tête des heures durant.

       Youth Lagoon c'est un petit miracle venu de nulle part, un p'tit gars solitaire, au spleen persistant, qui s'est mis à faire de la musique tout seul chez lui avec ses claviers, guitares et quelques boucles electro. Vous avez sûrement déjà entendu cette histoire, c'est aussi celle d'un certain Justin Vernon, alias Bon Iver ou encore de Peter Silberman évoluant au sein de The Antlers. De nos jours beaucoup d'artistes utilisent la méthode "Do It Yourself" pour se constituer un petit cocon et ainsi composer, enregistrer avec une liberté de ton indéniable et cracher à la face du monde, leur détresse, leur déprime. En ressortent alors quelques OVNI qui arrivent jusqu'à nos oreilles pour ne plus les lâcher. Pour Youth Lagoon, c'est bandcamp qui a fait office de moyen de communication. Distillant ces petits bijoux comme des miettes de pain durant tout cet été 2011 sur son site, l'auteur s'est fait une réputation grandissante par le bouche à oreille. Puis c'est la signature sur Fat Possum, label indé à tendance blues/rock qui a pourtant fait les yeux doux à ce petit prodige de la pop.

       Le résultat est à la hauteur des attentes suscitées l'été dernier. Il s'appelle The Year of hibernation, comme un hommage à la région qui l'inspire et cette autarcie créative dans laquelle il s'est plongé. C'est bien simple, les huit morceaux qui composent cet album finement ciselé sont tous plus beaux les uns que les autres. Difficile d'en sortir un du lot. Peut être serez-vous touchés par l'entrée rêveuse de Posters, la tubesque et presque dansante "Daydream" ou encore les deux sommets d'émotion que constituent "July" et "Montana". Peut être tomberez-vous amoureux de "The Hunt", conclusion élégante qui clôt l'album comme il l'a commencé, comme dans un songe... Au final cette œuvre est vraiment touchante, elle possède la grâce d'une douleur innocente, de mélodies dépourvues de toute complexité. Son immédiateté, sa sincérité ne sont pas sans rappeler le fabuleux "Hospice" de The Antlers. Cette voix haut perchée, fragile et légèrement en retrait, ces ritournelles magnifiques, ces mélodies pleines d'espoir qui font souvent les plus beaux albums mélancoliques...

       C'est l'histoire, donc, d'un p'tit gars qui nous livre ici un album magnifique, intime, léger et douloureux à la fois. C'est l'histoire d'un p'tit gars qui, espérons le, va grandir, grandir encore et nous prouver que, malgré le spleen qu'il suscite et qui existe finalement en chacun de nous, l'espoir existe, l'avenir aussi.

Gagoun

The Year of Hibernation en trois mots : beau, mélancolique, fragile


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • Hospice, THE ANTLERS, French Kiss Records, 2009 : Comme évoqué ci-dessus, beaucoup de similitudes entre ces deux albums. On ne parle pas ici de plagiat mais bien de ce que ces œuvres sont capables de susciter en terme d'émotion. A cet égard le troisième album (et un concept/album s'il vous plaît) de ce groupe américain à la sensibilité à fleur de peau est un véritable chef d’œuvre justement. Si la trame n'est pas très gaie puisque elle parle de l'expérience de vivre aux côté d'un proche à l’hôpital, sa musique regorge de très belles choses, entre folk, pop et indie rock très inspiré. L'album qu'aurait espéré faire un jour Arcade Fire?

  • Logos, ATLAS SOUND, 4AD, 2009 : Atlas Sound c'est Bradford Cox, songwriter génial de Deerhunter et donc en solo. Bricolage à la maison, sons distordus, folk décharnée, pop/rock étrange, electro bancale, un petit génie de ce nouveau siècle, incontestablement. Un sens de la mélodie captivant, un être brillant et mystérieux à la fois... Les amis sortez vos oreilles, son prochain album sort dans deux mois.

  • We Are Rising, SON LUX, Anticon, 2011 : Ryan Lott alias Son Lux nous a concocté, pour son deuxième album, un mélange précieux et subtil entre machines, cordes, guitares boisées et piano. Un résultat pop enchanteur qui fait de cet album, l'une des meilleures sorties de l'année en cours. Superbe!

  • The Age of Adz, SUFJAN STEVENS, Asthmatic Kitty, 2010 : Ici nous sommes loin du home studio solitaire de Youth Lagoon mais le déjà grand Sufjan nous montre sur son dernier album comment, avec du génie, des machines, un orchestre de poche et des guitares, on peut livrer un des meilleurs albums de pop des dix dernières années. Exit la légèreté, le versant grandiloquent d'un Youth Lagoon en quelque sorte...

mercredi 31 août 2011

Atma, YOB, Profound Lore Records, Août 2011 (Par Gagoun)



       Une fois n'est pas coutume : un peu de metal pour illustrer cet été radieux, léger et ensoleillé qui fut le notre dans le nord de la France... Plus précisément doom, stoner, psyché, sludge, bref tout ce qui est de l'ordre de la lourdeur, de l'opacité, du monolithe et de la fumette, voire plus si affinités. Si j'ai choisi cet album qui détonne un peu dans notre ligne éditoriale, c'est parce qu'il est l’œuvre d'un groupe un peu à part également dans l'univers métal et qui tranche avec la masse doom actuelle. Car ce serait trop caricatural de résumer Yob a un simple jam band de métalleux à riffs sous l'emprise de la défonce. Yob, c'est bien plus travaillé que cela, bourré de détails, de mélodies tordues mais accrocheuses, d'ambiances obscures calculées à la brume près. Yob, c'est varié mais cohérent, Yob sait s'ouvrir tout en rendant hommage au Sabbath ou à une autre légende de laquelle elle se réclame : Neurosis.

       Les trois de Yob viennent de l'Oregon et composent ensemble depuis 2002 déjà. A leur actif cinq albums. Atma constitue donc la sixième étape de ce voyage à la fois spirituel, majestueux et cradingue que constitue leur discographie. A ce titre Atma possède son lot de riffs envoutants, répétitifs et hypnotisants. Mais là où ces prédécesseurs faisaient l'objet d'un travail sur le son et la composition pour le moins énormes, Atma tranche par son aspect brut, sans fioritures, sale et « in your face ». « In your face », c'est d'ailleurs comme cela que débute l'album : sans intro, sans montée en puissance, juste un riff, une basse, une guitare, une batterie et v'lan ! Le son est énorme, rappelant quelque peu le travail d'Electric Wizard sur ses deux derniers albums avec cette volonté de travailler avec des techniques et des technologies analogiques des années 70, là où le métal est né en quelque sorte. En résulte un « Prepare the Ground » très groovy, stoner avec ce riff qui évolue doucement et cette voix d'extraterrestre sous champi. La suite est du même accabi, le morceau éponyme « Atma » et son riff de fin génial, le doomesque et accrocheur « Before we dreamed of two » ou encore l'épique « Adrift in a ocean ». A noter que les deux derniers morceaux évoqués voient l'arrivée en guest star de Monsieur Scott Kelly posant sa voix grave et plaintive sur ces ambiances yobesques : quand je voulais parlé de Neurosis ! Le tout va donc à l'essentiel, alternant growls de fin du monde et chant clair désabusé, mélodies orientalisantes et riffs acérés, la basse étant juste gargantuesque, la batterie, d'une lourdeur à faire pleurer et vomir à la fois n'importe quel batteur de jazz... Alors les détracteurs diront que le groupe régresse, joue la facilité, moi je trouve cet album cathartique, régressif certes mais après tout la régression ne fait-elle pas partie de l'essence même du rock ? Le rock n'est-il pas avant tout un terrain de jeu pour grands enfants (ou moins grands d'ailleurs!) ?

       Un bon échappatoire vers les entrailles de notre bonne vieille Terre, voici ce que je vous propose en ce mois d'août. De toute façon il fait pas bien meilleur en surface... Laissez-vous aller!

Gagoun

Atma en trois mots : régressif, mystique, opaque


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • The Great Cessation, YOB, Profound Lore Records, 2009 : Un autre monument de la discographie de Yob dans un genre plus « aérien » avec un accent sur les mélodies, les ambiances typées presque post rock très marqué. Enorme!

  • Dopesmoker/Jerusalem, SLEEP, Rise Above/Tee Pee Records, 1999-2003 : Edité en deux fois en raison de son format peu habituel, Dopesmoker est au aujourd'hui un monument du doom. Et pour cause, le deuxième et ultime alum de Sleep n'est autre qu'un morceau de 52 minutes. Hypnotisant et lourd à la fois, il a influencé toute une génération de musicos.

  • Summit, THOU, Gilead Media, 2010 : doomy, sludgy, mélodique, l'excellente surprise de ces doomers américains venus de Louisiane montrent qu'on peut faire preuve de talent de composition tout en produisant une musique lourde et déchainée.

  • Black Masses, ELECTRIC WIZARD, Rise Above, 2010 : peut-être pas le plus représentatif du genre ni le meilleur de la discographie de cet immense groupe mais un album qui illustre parfaitement la volonté de retour aux sources du rock et des années 70. Suffit d'écouter le son enfumé, opaque et le psychédélisme que dégagent les morceaux qui le compose.

Organ Music Not Vibraphone Like I'd Hope, MOONFACE, Jagjaguwar, Août 2011 (Par Riton)



       Combien de fois avez-vous déjà entamé l'écoute d'un disque en vous disant "oh putaing! que c'est kitsch" (ça c'est la version Pagnol-Bosso)??... une suite d'accord, un son, une voix et c'est l'hilarité... Seulement parfois un petit détail suffit à transcender l'ensemble, à loger la musique au creux de votre oreille... et vous voilà une fois de plus colocataire d'un ami ringard, vintage, plus dur à assumer que les autres mais si attendrissant, le genre d'ami qui accumule nombre d'objets tous plus laids les uns que les autres mais pour lesquels il a un tas de belles histoires à raconter (ou comment faire passer un rideau à franges, une boule à neige et une collection de dauphins miniatures pour heureux souvenirs d'enfance). C'est en partie ce qui m'est arrivé il y a quelques années avec des groupes tels que les Bunnymen, Orange Juice, Devo, Oingo Bongo, voire pire, Duran Duran... Et à en croire le nombre florissant de productions faussement Lo-fi outrageusement cheap (le gros du catalogue Not Not Fun, chillwave, synth-pop 00' et compagnie), je ne peux qu'affirmer que ces groupes (entre autres...) sont ou étaient finalement résolumment modernes...

       Soit! Passons à Moonface! Premier constat au départ de mon écoute de ce Organ Music Not Vibraphone Like I'd Hope sorti ce mois-ci chez Jagjaguwar : dans le genre ça se défend! Mais d'où viennent ces synthés?! (de l'orgue en fait... c'est écrit) Et cette boite à rythme? Là où certains auraient déjà refermé la page j'ai décidé de continuer... coriace le Riton! A vrai dire, en connaissance de cause j'aurais bien été incapable de commettre une telle ignominie. En effet Moonface n'est autre que le projet solo (enregistré à la maison) de Spencer Krug, véritable génie canadien, à l'instar de Carey Mercer ou encore Nick Diamonds (dont je parlais le mois dernier, si vous avez suivi). Spencer Krug... une véritable marque de fabrique, label de qualité à lui tout seul. Jusqu'à maintenant les galettes où apparaissait le monsieur (Frog Eyes, Wolf Parade, Swan Lake, Sunset Rubdown...) n'avaient que très peu de chances d'être ratées... Spencer Krug, c'est en quelque sorte la Mère Poularde au pays de l'indie, Pont-Aven sauce poutine et sirop d'érable.

       Ici comme je l'évoquais l'énergumène a troqué sa guitare contre un orgue. L'exercice aurait pu être périlleux s'il n'avait déjà été tenté sur EP l'année dernière... avec un marimba (Dreamland EP : Marimba and Shit Drums), sorte de vibraphone originaire d'amérique du sud. D'ailleurs, à en croire le titre de ce premier album, les compositions étaient initialement destinées au même instrument (ou peut-être est-ce tout simplement une note d'humour). Quoiqu'il en soit on remarquera à l'écoute que les "percussions de merde" ont été conservées, tant la boite à rythme utilisée semble sortir des tréfonds de la préhistoire des musiques électroniques. Ça fait envie? Non?! Et pourtant je vous assure que cet album est une véritable petite perle! Si le travail avait été parfaitement réussi pour l'EP, il est maintenant surpassé : plus digital, plus visceral, plus varié (forcement, on passe d'un seul morceau à cinq), plus ample, tout en gardant cet amour de la mélodie et de la cohérence... Spencer Krug se pose en parfait artisan d'une musique soignée, excellant derrière son micro et son instrument jusqu'à émouvoir. Après les premières réticences, on finit par en oublier l'existence d'une touche Stop. Boucles synthétiques et chant... peu de choses finalement, mais derrière l'apparente répétivité se cachent en réalité de nombreux recoins, variations, solos subtilement distribués (subtilement oui... on est pas chez Malmsteem), accompagnés de cette voix si caractéristique, touchante... et des textes particulièrement bien écrits... Organ Music Not Vibraphone Like I'd Hope est une spirale, 37 minutes de musique hypnotique, lancinante, parfait exposé d'un art capable de tirer le plus beau de la plus simple expression, sans fioritures, sans prétentions... un homme et une machine...

       Spencer Krug prouve une fois de plus l'étendue de son talent, à l'aise en studio, à la maison, seul, en groupe et expose de manière étonnante une certaine capacité à prendre des risques (quitte à diviser ou ne pas être remarqué) avec un Moonface à l'emballage kitsh mais au contenu délectement si beau (comme son package aux contours violets et à l'intérieur vaporeux), qui dénote clairement de ses nombreux autres projets, excellents eux aussi mais extrèmement ressemblant les uns aux autres.

Riton

Organ Music Not Vibraphone Like I'd Hope en trois mots : hypnotique, mélodique, touchant


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • Shut Up I'm Dreaming, SUNSET RUBDOWN, Absolutely Kosher Records, 2006 : Deuxième projet de Spencer Krug après Wolf Parade, j'ai découvert Sunset Rubdown sur scène (en compagnie de Gagoun) et un de mes seuls souvenirs, en dehors du fait d'avoir apprécié, est la curieuse façon de jouer de Camilla Wynne Ingr sur ses cymbales... à savoir à l'aide d'un vibromasseur en fonction (gris métallisé pour les curieux). Depuis j'ai largement eu le temps de me rendre compte à quel point ce groupe est bon et particulièrement avec cet album... indie pop mélodique, féérique... l'occasion de se taire et de rêver un peu... le sourire en coin en repensant au concert!

  • Tears Of Valedictorian, FROG EYES, Absolutely Kosher Records, 2007 : Frog Eyes aussi a vu passer Spencer Krug dans ses rangs et notamment sur cet album... avec Carey Mercer en excellent maitre de cérémonie survolté, pour une musique détonnante, mélodiquement à tomber par terre, sensible et explosive... cet album est un chef d'oeuvre!

  • Best Moans, SWAN LAKE, Jagjaguwar, 2006 : Swan Lake doit probablement souffrir d'un déficit de référencement sur internet depuis le dernier Aronofsky... mais ça n'enlève rien au fait que ce groupe est incontournable et cet album majestueux, à connaitre absolument! Inutile de vous rappeler les protagonistes... d'autant plus que la frontière avec Frog Eyes est d'un point de vue musical vraiment ténue...

  • Beak>, BEAK>, Invada Records, 2009 : Sieur Barrow derrière les fûts, soit la moitié de Portishead, une basse dantesque et des synthés vintage... un Krautrock moderne bien pensé (le Kraut de Beak), mathématique, planant, répétitif et pourtant pas ennuyeux pour deux sous! Un premier album plus que réussi qui prend toute son ampleur sur scène!

lundi 1 août 2011

I Am an Attic, NICK DIAMONDS, Autoproduction, Juillet 2011 (Par Riton)



       Le cerveau est une étrange bête tout de même... Je ne parle pas de l'aspect gélatineux, mi-vivant mi-mort, de la chose... de la texture si particulière qui au milieu d'une belle assiette ferait tourner les yeux de plus d'un d'entre nous... non, je parlais plutôt de la mémoire. Dès le plus jeune âge, nous recevons en permanence une plâtrée d'informations, des plus futiles aux plus cruciales : certaines vont être sollicitées quotidiennement, d'autres ne vont guère faire long feu... beaucoup seront également enfouies dans les méandres de notre petite tête et resurgiront aux moments les moins attendus. Si je parle de cela, ce n'est bien évidemment pas pour philosopher (d'autant plus que pour ma part je me situerais plus près du comptoir que de Platon) ou donner un cours de neuroscience (je suis une buse... google est mon ami) mais pour évoquer à quel point le "travail" de mélomane est parfois compliqué. Si une écoute peut se solder par le passage d'une oreille et la sortie par l'autre, sans se fixer, quelques artistes vont au contraire rester et de temps à autres remonter à la surface... au détour d'une lecture, d'une vision... The Unicorns (entre autres) et son unique album Who Will Cut Your Hair When We're Gone?, premier groupe du montréalais Nick Thornburn (alias Nick Diamonds) fait partie pour moi de ces groupes... un simple mot, un son... jusqu'à s'immiscer dans une de mes séries comiques préférées (dans l'épisode 12 de la saison 5 d'How I Met Your Mother, on apprend que la future femme du héros Ted Mosby adore cet album).

       L'indie rock des Unicorns m'a tout de suite tapé dans l'oreille (les deux plus exactement), dès la première écoute : la justesse de ses mélodies, son petit grain de folie et son esprit foutraque légèrement décalé, bourré d'humour... En 2005, un an après la facheuse séparation du groupe, Nick Diamonds part avec J'aime Tambour former Islands (de son côté Alden Ginger rejoindra les rangs de Constellation avec Clues) : albums en dents de scie mais talent indéniablement toujours présent.

       Pas de nouvelles des canadiens depuis 2009 alors imaginez ma surprise et ma joie en apprenant en début de mois la sortie du premier album solo de l'ami Nick! Surpris, parce que je ne l'avais pas vu venir... aucune promotion, aucune annonce préalable... l'album est autoproduit, en streaming et téléchargement gratuit via sa page bandcamp... contre toute attente, un véritable cadeau d'anniversaire (natif de juillet, à bon entendeur(s)(es)...). Joyeux, deux fois... bien sûr par la surprise en question... ensuite par l'écoute. Pas de doute, on est bien chez Nick Thornburn. Sa voix est toujours aussi douce et reconnaissable dès les premières notes d' "Attic". Cette fois le musicien est seul, joue de tous les instruments et nous livre ses confessions. L'exercice se veut plus intimiste et ça s'entend! On est d'emblée frappé par la douceur des compositions, empruntes d'une aura des plus rassurantes ("Used To Be Funny", "Words Was Swords", "Don't Do Us Any Favours", "In Dust We Trust" et j'en passe...pour ne pas citer tout le tracklisting). Une guitare limpide, coiffée de quelques discrets effets... une basse ronde et précise, bien sentie... une boite à rythme organique et des nappes de synthés... tels sont les éléments constitutifs d'un cocon, d'une enveloppe quasi-charnelle dans laquelle il fait bon vivre. Triste, joyeux, nostalgique, ou les trois à la fois, Nick Diamonds est là... et je me rappelle enfin d'où vient cet amour si profond pour un groupe comme les Unicorns : cette faculté de réconfort, cette facilité à faire se sentir chez soi...

       Je proclame Nick Thornburn "songwriter émérite"! A tout juste trente printemps, le musicien réussit un premier effort sans faute, qui sans forcer arrivera à hanter les esprits... I Am An Attic rejoindra sans mal la liste de ces albums dont je parlais, capables d'utiliser la mémoire comme terrain de jeu... le genre d'album pour lequel on a parfois l'impression d'être le seul auditeur, que l'on voudrait quoiqu'il arrive garder pour soi. Cette sensation est ici bien évidemment renforcée par la relative discretion de la sortie... il est cependant dommage que pour un fétichiste comme moi, exhumer l'album se résumera malheureusement à une recherche dans ma librairie mp3... on saluera tout de même la démarche de l'artiste, en espérant voir un jour une édition sur support discographique, pour les fans. Dans le cas contraire, ce ne serait pas si grave!

Riton

I Am an Attic en trois mots : beau, doux, réconfortant

L'album en écoute et téléchargement gratuit : http://nickdiamonds.bandcamp.com/ (dans le cas où vous vous sentiriez généreux, un EP bonus de six titres intitulé I Am an Ep vous sera envoyé)

Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • Who Will Cut Your Hair When We're Gone?, THE UNICORNS, Alien 8 Recording, 2003 : Quel est donc cet album à l'artwork si coloré (fait main, aux crayons couleurs les enfants!), au nom si drôle et à rallonge? (Qui vous coupera les cheveux quand nous seront partis?). Hormis le fait que je parle de cet album depuis le début de la chronique et qu'il s'agit du seul album des licornes, W.W.C.Y.H.W.W.G est tout simplement à couper le souffle... pop, rock, catchy, drôle mais mélodiquement superbe... un album à siffloter, mais pas que!

  • Return To The Sea, ISLANDS, Rough Trade, 2006Islands, soit les 2/3 des Unicorns : moins foufou, plus sophistiqué, grandiose... cerise sur le gâteau, ce premier album, le meilleur à mon sens, présente un des plus beaux morceaux d'introduction qu'il m'aie été donné d'entendre! (avec un solo de guitare renversant!)

  • Blue Screen Life, PINBACK, Ace Fu Records, 2001A la fois délicat et techniquement irréprochable, Pinback complète la liste des groupes avec lesquels je ne fais qu'un. Bien qu'à mon goût rien est à jeter dans leur discographie, Blue Screen Life est probablement mon album préféré. Chose rare, en bon bassiste que je suis (je n'ai pas dit que j'étais bon, c'est une expression...), je lorgne sans modération sur le jeu et le son de Zach Smith!

Two-Way Mirror, CRYSTAL ANTLERS, Recreation Ltd., juillet 2011 (Par Gagoun)



       19 février 2009, soir de mon 24ème anniversaire, c'est peut-être un détail pour vous mais pour moi ça veut dire beaucoup, ça veut dire... Raaaaaah. Bref un soir un peu particulier puisque Riton et moi même entre autres compagnons, devions nous rendre à l'Aéronef à Lille pour voir, en concert s'il vous plaît, ces drôles de bonhommes que nous connaissions à peine dans le cadre de notre formation estudiantine. Vous me direz, il y a pire comme travail d'étudiant mais pas le jour de MON anniversaire quoi. Tant à aller voir un concert, autant que ce soit moi qui le choisisse... Et bien... non...snif... Je geints, je geints... Et puis j'écoute leur premier EP... Ah ouais quand même ! Bonne petite claque de rock noisy surpuissant, un peu barré, un peu speed, un peu lofi et surtout accrocheur au possible ! Bon pourquoi pas... Au final la prestation scénique confirme le talent mélodique et le charisme de ces américains sortis de nulle part, enfin pas tant que ça puisqu'ils ont déjà signé sur le désormais célèbre label de Chicago Touch & Go. L'après concert nous réserve une bonne surprise puisque nous sommes quelques uns (Riton est toujours de la partie... Comme d'hab...) à échanger avec les membres du groupe autour de quelques bières dans un bar lillois et ce jusque tard dans la soirée. Dommage que la charmante demoiselle qui fait désormais partie du groupe, n'était pas là à l'époque ! Bref bons souvenirs de petits gars intéressants, bourrés de talent et donc très accessibles. Mon anniversaire est sauf ! Ouf !

       Voilà j'arrête de vous raconter ma vie. Quelques mois plus tard, un premier album, Tentacles, voit le jour. C'est aussi le dernier album du catalogue du désormais défunt Touch & Go Records... resnif... D'autant plus que l'album m'apparaît comme décevant : trop foutraque, trop compressé, trop préssé. Peut-être un peu trop d'attente par rapport à ce groupe un peu spécial... Exit le jusqu'au boutisme de l'EP, cette voix hurlée rappelant parfois celle du grand Kurt. Les morceaux sont courts, fourmillent d'idées mais qui ne prennent pas le temps de se développer. Pourtant le talent est toujours là, les mélodies inventives, le psychédélisme typé 60's, les morceaux noisy à souhait, l'énergie punk. Un bon présage pour l'avenir peut-être ?

       Dans la lignée du précédent et paru cette fois-ci sur le label Recreation Ltd., Two-Way Mirror est en effet bien meilleur. Si je regrette encore et toujours ce désormais éternel premier EP, la sauce prend sur ce nouveau cru. Les déflagrations sonores sont toujours légions mais quelques petits apartés noisy viennent calmer le jeu, comme autant de respirations avant de repartir pour le Grand Huit. Elles sont bienvenues et permettent réellement d'apprécier les mélodies clavier/guitare/basse, toujours complexes mais inventives et barrées. Les morceaux sont toujours aussi denses et méritent plusieurs écoutes avant d'être appréciées réellement mais c'est foutraquement bon cette fois-ci. Ça part dans tous les sens, le batteur ne s'est toujours pas calmé, changeant de tempo comme Lady Gaga, de tenue vestimentaire, et c'est tant mieux. Andy Bell, chanteur et bassiste de son état, possède toujours cette même voix expressive et éraillée ; Andrew King et sa guitare tissent des murs de sons à coup de mélodies pop, de riffs assassins et de solo déjantés. Il n'y a qu'à écouter le morceau de clôture ''Dog Days'' pour s'en convaincre. La production, quant à elle, est plus ample et permet d'apprécier tout le travail d'arrangements sans avoir la crainte de voir arriver le mal de crâne qui tue. Un bon défouloir en somme que ce Two-Way Mirror. Punk dans l'intention, pop dans les arrangements, psyché dans la démence, noise dans la rock'n roll attitude. Soit les mêmes ingrédients que sur Tentacles mais mieux maîtrisés et vraiment appréciables à leur juste valeur. Un défouloir qui en appelle d'autres assurément et pourquoi pas un p'tit chef d'oeuvre à venir ! En attendant, à écouter en courant dans tous les sens, n'importe où pourvu qu'il fasse beau et qu'il vous donne le sourire aux lèvres...

Gagoun

Two-Way Mirror en trois mots : récréatif, noisy, poppy


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être :

  • EP, CRYSTAL ANTLERS, Touch & Go, 2008 : Si si j'insiste ! Grosse claque que ce premier EP « no limits » et particulièrement intense ! Le dernier morceau s'appelle "Parting Song For The Torn Sky", il est juste incroyable de lourdeur, d'expressivité et il transpire le rock.

  • Black Square, DD/MM/YYYY, We Are Busy Bodies, 2009 :  DD/MM/YYYY (prononcé "day month year" et non "dédé emem igrecigrecigrecigrec"...), non content d'être des bêtes de scène, nous livrent ici un album réellement existant et inventif. Purée expérimentale rock, noisy, psyché... dégomme (du synthé analogique à fond les potards et des guitares crachouillantes), percute (forcement, avec deux batteurs aussi frappadingues) et fait preuve d'un sens de la mélodie et de la cohérence particulièrement déconcertants. On ne parle pas encore assez de ce groupe mais ça changera forcement... et plus tôt qu'on ne le pense.

  • Set Em' Wild, Set Em' Free, AKRON/FAMILY, Dead Oceans, 2009 : Dans la catégorie "indierockers foufous", je demande toute la famille Akron. Ca part dans tous les sens, des rythmiques tribales à la funk en passant par par l'electro, l'experimental, la funk et la folk, les joyeux new-yorkais se rapprochent de Crystal Antlers par leur douce folie, leur capacité à casser les rythmes et leur énergie sans égal. A voir sur scène absolument!

samedi 2 juillet 2011

Bon Iver, BON IVER, Jagjaguwar/4AD, Juin 2011 (Par Gagoun)



       Raaaaah le voici! L'un des albums les plus attendus de cette année 2011, j'ai nommé Bon Iver de... Bon Iver. Alors cette chronique ne vous ouvrira sans doute pas la porte sur une obscure découverte venue d'un petit label non moins obscur, mais quand le résultat est à la hauteur de l'attente, ce qui soit dit en passant est plutôt rare, il mérite d'être salué.

       Petit rappel, Justin Vernon, alias Bon Iver, est l'auteur d'un des plus beaux bijoux folk de notre ère moderne. En 2008, le jeune homme, amoureux éconduit et par ailleurs inconnu du grand public, part s'isoler quelques mois dans une cabane dans le Wisconcin avec sa guitare et de quoi enregistrer. Il revient à la civilisation avec dix chansons toutes plus belles les unes que les autres pour les poster sur le net. Alors repéré par le label Jagjaguwar, ce dernier décide de signer l'homme/groupe et de diffuser l'album. C'est la découverte de For Emma, forever ago par le grand public. La suite, ce sont des critiques dithyrambiques, une aura autour de la création de l’œuvre, des collaborations multiples (plus ou moins réussies), des morceaux ornant des épisodes de séries télé, une reprise de "Flume" par Peter Gabriel sans compter les nombreux groupes qui se réclament désormais de l'influence du chanteur compositeur.

       Trois ans plus tard, ce serait un euphémisme de dire que cet album était attendu. Alors comment succéder à un album sorti de nul part, créé dans des conditions particulières ? Bon Iver est-il l'homme d'un album ? Un coup de génie et puis s'en va ? Et bien la réponse est non, sans hésiter. Le tour de force est ici d'autant plus important que l'homme arrive une nouvelle fois à nous surprendre en ne créant pas un For Emma, forever ago the return mais bien un album nouveau, de nouveaux ingrédients, sans pour autant se renier. Je m'explique : Le son évolue sur cet album éponyme, prend de l'ampleur, gagne en électricité. Le jeune homme grandit. La folk épurée laisse place à une pop/rock teinté de guitares acoustiques discrètes mais surtout d'arrangements faits de cordes, de cuivres, de guitares électriques et de claviers très typés 80's. Car c'est là l'une des particularités de l'album. Une production tout droit sortie des années disco, plutôt osée voire risquée mais qui fonctionne parfaitement ici. Le morceau de clôture "Beth/Rest", son piano en delay, son vocoder en sont une parfaite illustration. Non ne fuyez pas car tous les ingrédients sont parfaitement intégrés et servent les compositions de manière très juste, comme dans un écrin soyeux. On y retrouve aussi ce qui fait le son Bon Iver d'antant : des arpèges lumineux et accrocheurs, des voix de têtes doublées, une invitation à se transcender tout en douceur, une mélancolie à la fois grave et pleine d'espoir. L'entrée en matière "Perth" et la légère "Holocène" sont juste splendides. Le tout forme un ensemble très cohérent, les morceaux s'enchainant de manière fluide tout comme les ambiances. L'album évolue ainsi de la lumière à l'opacité, de la mélodie à l'abstraction avec en point d'orgue l’entraînante "Calgary", qui vient casser quelque peu le confort construit à coup de nappes de claviers dans lequel nous étions installés.

       C'est bien simple, Bon Iver invente et réinvente un son et un style qui lui sont propres. Difficile alors de l'étiqueter, de mettre des mots sur cette œuvre. Suffit juste de l'écouter, de se laisser emporter par cet artiste touchant et terriblement talentueux. Comme une nouvelle naissance, un vrai nouveau départ après l'OVNI que constituait For Emma, forever ago, ce n'est pas pour rien que l'album porte le nom se son créateur. Il faudra compter avec le bonhomme à l'avenir, sans aucun doute. A écouter... en boucle !
Gagoun

Bon Iver en trois mots : soyeux, novateur, beau


En écoute intégrale : http://www.deezer.com/fr/music/bon-iver/bon-iver-1129655

Le clip de "Calgary" : http://www.youtube.com/watch?v=0KrmxavLIRM

Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • For Emma, forever ago, BON IVER, Jagjaguwar, 2008 : Un des plus beaux albums de folk de ces dernières années donc. Infiniment touchantes et personnelles, les compositions boisées de Bon Iver sont finement arrangées par ces camarades Christy Smith, Randy Pingrey et John Dehaven à son retour du Wisconcin. Entre fragilité et envolées lumineuses, cet album est juste beau.

  • Sevens Swans, SUFJAN STEVENS, Sounds Familyre, 2004 : Un album épuré, empli de mélodies lumineuses et fragiles pour l'un des auteurs les plus créatif de sa génération. Un an avant Illinoise, autre chef d’œuvre folk contemporain...

  • Snowbeast, LUKE TEMPLE, Minimum Music/Differ-Ant, 2008 : Avant d'être le leader d'Here we go magic, Luke Temple nous a gratifié entre autres de ce très bel album folk tout en retenue et en fragilité. Avec ses éléments électro discrets, ses arrangements finement ciselés et sa voix haut perchée, l'artiste fait partie de cette génération d'artistes folk émergente et très prometteuse.

  • Siskiyou, SISKIYOU, Constellation Records, 2010 : Colin Huebert et Erik Arnesen, deux ex membres de Great Lake Swimmers se réclament ouvertement de l'influence de Bon Iver. Et cela s'entend ! Un album efficace, plein de petites perles folk bricolées à la maison pour un résultat encourageant bien qu'un peu court dans la durée. En attendant un second album... Avec impatience !